...Assassiné
par la répression féroce qui sévit en France dans les luttes
environnementales. On risque la mort en s'opposant à la construction
d'un barrage, on risque de perdre un œil, de perdre l'usage de sa
main en s'opposant à l'implantation d'un aéroport, à
l'installation d'une ligne à très haute tension, en s'opposant au
passage d'un convoi nucléaire. On risque la prison ferme, pour ces
mêmes raisons, mais aussi en s'opposant à l'installation d'une démentielle ferme-usine (ferme des 1000 vaches près d'Amiens) réduisant l'animal à une simple matière
première et l'être humain à un décérébré consommateur de junk
food !
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Rémi Fraisse |
Les forces de l'ordre
possèdent un arsenal meurtrier dont il faut exiger l'interdiction
définitive et immédiate. C'est la moindre des choses. Que la
mort de Rémi Fraisse ne soit pas vaine et inutile, et surtout que
les circonstances de sa mort ne puissent plus se reproduire à
l'avenir.

Lors des luttes contre
les lignes à très haute tension (THT) dans le Sud Manche, de nombreuses
personnes ont été blessées par des éclats de grenades de
désencerclement, les fragments métalliques peuvent s'enfoncer
profondément sous la peau. Il suffit que l'un de ces éclats ouvre
une veine irrigante ou pénètre un endroit fragile du corps pour que les
conséquences soient tragiques. Lors des manifestations de
Montabot, à l'observation des blessures, les médecins croyaient
qu'il s'agissait de blessures par balle (comme nous le décrions dans notre article ICI). De nombreux autres
exemples tragiques du même acabit sont à déplorer dans les
manifestations de ces dernières années. Il est plus que
temps d'exiger l'interdiction de ces armes de guerre !
Dans quelles circonstances Rémi a-t-il été assassiné ?
Le très jeune Rémi
Fraisse, 21 ans, a été assassiné au cours d'une manifestation. Oui, on meurt de contestation politique dans la France de 2014.
Il n'avait aucun souci de
santé en particulier. Il s'est juste retrouvé la cible d'un tir
tendu de la gendarmerie mobile en sa direction, puis s'est effondré,
abattu par le projectile. C'est la seule
réalité. Un homme est mort, assassiné par les forces de l'ordre.
Il n'y a pas d'autre lecture à avoir que l'évidence dramatique qui
s'est produite et sur laquelle on ne peut revenir.
Cet homme n'était pas un
criminel, ni un délinquant, ni un fraudeur, ni un corrompu. Il
s'agissait seulement d'un anonyme. Issu de cette grande majorité qui
n'a pas besoin de faire parler d'elle pour exister. Un anonyme qui
n'exerce pas d'abus de pouvoir, de détournement fiscal, de prise
illégale d'intérêt, de fausses déclarations, de corruption
organisée, d'armement illicite, de développement et de soutien à
des activités néfastes pour l'Homme sur l'environnement...

Dans ce cas précis, Rémi
Fraisse a décidé de lutter contre une absurdité : la
construction d'un barrage sur une zone humide (niche écologique)
afin de créer un réservoir d'eau pour qu'une vingtaine d'agriculteurs puissent irriguer leur maïs. Oui, du maïs dans le Tarn, région sèche et pas du tout appropriée pour ce genre de
culture. Le Conseil Général a voté ce projet à l'unanimité sans jamais réellement consulter l'opinion publique.
Depuis, une lutte s'est
constituée, difficilement. D'abord par des riverains, soutenus
ensuite par des associations écologistes ainsi que des zadistes
venant d'autres luttes du même genre (lutte contre l'aéroport
de Notre-Dame-des-Landes par exemple). Difficilement, car la
répression a été féroce depuis le début, de nombreux
manifestants ont été blessés ou interpellés. Les médias n'ont
quasiment pas couvert ces événements, mais la détermination des
manifestants n'a eu de cesse que de faire connaître cette lutte et
de la populariser au-delà des frontière du Tarn, jusqu'à la grande
manifestation nationale du samedi 25 octobre, à l'issue de laquelle Rémi a perdu
la vie.
Les opposants, à Sivens
comme ailleurs, reprochent aux pouvoirs publics un manque de
concertation, un déni total de démocratie sur des questions
impliquant l'avenir énergétique et environnemental de la France.
Depuis 50 ans,
l'aménagement du territoire se fait de façon complètement
technocratique sans jamais demander réellement l'avis des habitants
concernés. On détruit à coups de bulldozers, on défriche, on
draine, on bétonne, ferraille, on colonise la terre agricole et les
écosystèmes. On avale sous le béton l'équivalent d'un département français
tous les sept ans, jusqu'à ce que le pays ressemble à un
gigantesque parking de supermarché !
Décisions unilatérales,
prises pour favoriser des groupes privés : Vinci, Areva,
Veolia, Bouygues... s'accaparant le territoire pour faire fructifier leurs
capitaux.
Mais Rémi Fraisse est mort. Mort pour la vie !
Car il ne défendait pas
une idéologie mortifère, n'appelait pas au crime. Non, il
souhaitait seulement la protection d'une zone humide, nicheécologique abritant une biodiversité abondante et variée.
Rémi Fraisse, par sa présence sur cette Zone à Défendre (ZAD), côtoyait des citoyens conscients s'interrogeant sur le bien-fondé
d'une croissance économique infinie dans un monde fini. Il
s'interrogeait probablement sur la dérive, voire la perte totale de contrôle de
la science, de la technologie et du marché par nos sociétés ; sur la perte de repères liée à un monde où la
morale disparaît, où l'éthique n'a plus cours, où l'on se laisse
couler dans la société de consommation, drogués et inaptes que
nous sommes tous à observer et contester le cap pris par le bateau
ivre dans lequel nous sommes tous embarqués.
Rémi Fraisse faisait
certainement partie, conscient ou non, de ces lanceurs d'alertes, de ces gens qui
décident de prendre leur destin en main et de lutter contre des
ennemis surpuissants et invisibles.
Que sa mort ne soit pas
vaine ! Rémi n'est pas mort
d'un accident, comme le répètent sans cesse les autorités de
ce pays. Rémi est mort assassiné pour ses idées, parce
qu'il s'est levé, parce qu'il a ôte ses œillères et décidé de
se battre avec ses faibles moyens contre les moulins à vent
dévastateurs du capitalisme.
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Affrontements au Testet |
La répression policière
n'est que la conséquence d'une absence de démocratie, de débat et
de dialogue social. Elle est l'échec des institutions républicaines. On
ne peut légitimer sa mort, comme le font les ministres et le Président, en affirmant que les manifestants sont violents ! Les
manifestants n'ont tué personne et sont sur la défensive face aux
offensives policières. Rémi a été assassiné et le gouvernement
en est indirectement le responsable. Il s'agit clairement d'une mise
en défaut de la République.
L'État ne peut plus se
cacher derrière l'idée de République, il n'y a plus de république.
Il y a des citoyens de différents ordres, de différents statuts
sociaux :
- D'un côté on a Christophe de Margerie, le PDG de Total décédé dans un accident, lui, le 20 octobre 2014. Il dirigeait un groupe qui ne paie pas d'impôts en France, responsable de marées noires, de pollutions démentielles en Afrique et ailleurs, baignant dans la corruption, réalisant des profits démesurés et qui a droit à des funérailles nationales très élogieuses, en présence de nombreux ministres.
- De l'autre on a Rémi Fraisse, jeune homme de 21 ans, tué par la violence policière, un anonyme qui décide d'exprimer son droit à manifester pour s'opposer à des absurdités économiques et environnementales. Silence total du gouvernement pendant deux jours après sa mort. Mise en accusation des manifestants, légitimation des violences policières, refus de reconnaître qu'il s'agit d'une bavure...
Deux poids, deux mesures. Ces deux vies n'ont pas
la même valeur aux yeux de l'État.

Cette mort ne doit pas
être vaine et, sans être instrumentalisée, doit devenir le
déclencheur d'un grand mouvement revendiquant la justice sociale, le
respect, et une véritable démocratie où le choix de la Raison prime
sur le pouvoir de l'argent.
XX
Renoncule à feuille d’ophioglosse
Rémi fraisse participait à un
groupe de protection du renoncule à feuille d’ophioglosse, une
espèce rare en Midi-Pyrénées, menacée par la destruction de son
milieu. En hommage, certains mettent le renoncule en image de profil
sur les réseaux sociaux. Il est aussi possible et fortement
recommandé d'en arborer des répliques lors des manifestations de
soutien !
Merci pour ce bel et réaliste article!!! Je vous indique tout de même qu'il y a erreur sur le département énoncé comme le Gard alors qu'il est question du Tarn; ;-) Merci
RépondreSupprimermerci ! (étourderie modifiée)
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